Vous arrivez en tournoi, vous venez de finir votre croissant et votre café pour espérer avoir l’esprit un minimum alerte. Les appariements tombent, vous vous dirigez vers la table qui vous a été assignée, y trouvez votre adversaire, figurines déjà prêtes. Vous jetez un œil à son armée en sortant la vôtre, vous en profitez pour balayer du regard le futur champ de bataille, peut-être des forêts ou des ruines, un désert ou une lande marécageuse…
Alors que l’organisateur passe annoncer le début des parties, vous vous retrouvez face à un grand vide : et maintenant, comment allez-vous vous déployer ?
Note d'Amàndil
Pour ma part, j’irai même plus loin : c’est la phase la plus importante du jeu. Je ne sais pas si on peut gagner une partie au déploiement, mais on peut clairement la perdre.
Contrairement à une partie d’échecs par exemple, où les deux adversaires occupent des positions identiques et équitables, à MESBG, vous pouvez et devez essayer de vous mettre dans de meilleures dispositions que l’adversaire en début de partie en prenant l’avantage avant même que la partie ne commence.
Cette phase, déterminante, est pourtant largement sous-estimée par beaucoup de joueurs, notamment les débutants : or, en tournoi, les parties sont chronométrées, être bien placé dès le début de la bataille apporte un avantage tactique majeur. D’ailleurs, la plupart des parties qui voient s’affronter un joueur expérimenté et un joueur débutant se règlent directement lors de cette phase…
Je prendrai un exemple pour illustrer mon propos : lors d’un tournoi sur Paris, je suis tombée contre un joueur de nains des Monts de Fer sur le scénario Capture et Contrôle. Je menais pour ma part une armée Mordor-Reine Araignée assez standard, et le matchup ne m’enchantait pas du tout : avec un scénario où l’on commence directement au contact, je ne voyais pas vraiment comment empêcher les nains de massacrer mes troupes et de prendre le contrôle des objectifs en me démoralisant au passage. Les joueurs plus expérimentés avec qui je discutais ne voyaient pas vraiment non plus, d’ailleurs. Imaginez donc leur air surpris quand je leur ai annoncé que j’avais gagné 8-0.
Alors que s’est-il passé ? Aucun coup de maître stratégique de ma part. Mon adversaire, débutant, ne s’était pas déployé face à moi à 24 pouces du bord : il avait voulu rentabiliser ses arbalétriers nains en les installant sur un décor en hauteur, ce qui a forcé ses troupes à s’organiser autour… à environ 12 pouces de loin de moi et des trois objectifs frontaliers.
Dès que je l’ai vu s’installer comme ça, j’ai compris comment la partie allait être pliée. Avec le temps de s’approcher et la durée des rounds (moins de 2h), jamais les nains n’auraient moyen de percer mes défenses si je me mettais plus loin que les objectifs, de sorte à les avoir dans le dos. Et c’est exactement ce qui s’est passé. Rien qu’avec un déploiement, la partie est passée d’un matchup défavorable pour moi à une victoire majeure.
Du coup, difficile de nier l’impact du déploiement sur le déroulé d’une partie. Et pour cause : le déploiement reflète l’intention et le plan de bataille de celui qui l’exécute. D’une part, cela implique qu’il est possible, quand on a l’œil, d’y déceler les intentions de son adversaire (ce qui peut être un sacré avantage !). D’autre part, cela veut aussi dire qu’il est essentiel d’être au point sur la façon dont on veut jouer la partie au moment où l’on se déploie. Dans le cas contraire, il y aura des ratés dont les conséquences pourront être plus ou moins graves : au mieux, vous perdrez du temps à réorganiser vos troupes, au pire vous perdrez directement la partie. Notez bien que moins votre armée sera mobile et moins la partie sera longue, plus l’impact du déploiement sera important : vous replacer prendra plus de temps et vous aurez moins de tours pour le faire.
Avoir un plan de jeu clair peut paraître simple, mais c’est en fait ça qui rend le déploiement compliqué à aborder. Non seulement il faut savoir comment faire pour gagner, mais en plus il faut arriver à mener cette réflexion rapidement, dans les quelques minutes qui suivent la découverte de l’armée ennemie et de la carte. Les joueurs les plus rodés de la scène compétitive en sont capables, c’est même ce qui leur donne une longueur d’avance sur les autres : ils savent déjà comment la partie devrait se dérouler et ce qu’ils doivent faire pour l’emporter. Je ne promets pas qu’à l’issue de votre lecture, vous verrez quatorze univers parallèles différents de possibilités pour le meilleur déploiement qui soit, mais je peux au moins fournir quelques clés pour aborder la situation.
Note d'Amàndil
J’évoquais déjà ceci dans la 15ème « Astuce de pro » partagée avec Le Maître des Dés dans la vidéo ci-contre, que je vous recommande.
La démarche du déploiement
Je pense qu’avant d’aborder les conseils pratiques pour se déployer, il peut être pertinent de s’attarder un peu sur cette réflexion qui l’accompagne de “comment gagner la partie” (voire simplement “comment ne pas perdre” hein, moi on m’a appris que c’était bien aussi). Là non plus je n’ai pas l’ambition de donner une réponse universelle (si je l’avais, je serais au WTC !), mais des pistes qui peuvent aider à trouver.
Premier axe de réflexion : l’armée adverse par rapport à la vôtre. Evaluez le matchup pour savoir si vous êtes en position de force ou pas. Êtes-vous plus nombreux ? Plus mobile ? Qui a le plus de puissance de tir ? Quelle phalange est la meilleure au combat (Force, Défense et Capacité de Combat sont les principaux indicateurs) ? Quelles figurines adverses présentent une menace (magiciens, gros héros, monstres) ? Qu’est-ce qui risque de gêner les menaces de votre propre armée (cherchez les magiciens adverses, les autres gros héros ou les héros avec la Défense Héroïque) ? Pas de miracle : cela implique une part non négligeable de connaissance de jeu d’évaluer le danger que présente l’armée ennemie.
Dans un second temps, intéressez-vous au scénario, car c’est lui qui vous dira réellement si votre armée peut sortir gagnante. Affronter Barad-Dûr sur Contrôle du Champ de Bataille ? C’est plutôt bon. Affronter Barad-Dûr sur Combat des Champions (déso Shaka promis c’était écrit avant que ça n’arrive) ? Au secours.
Tous les scénarios ne demandent pas les mêmes qualités à une armée et à ce titre, il est important de savoir lesquels sont les plus à votre avantage. Ainsi, si votre phalange tape fort et que vous êtes nombreux, vous allez apprécier les scénarios de défense de zone. Si vous êtes très mobile, Reconnaissance est probablement pour vous. Si vos héros sont tous faiblards et faciles à tuer, prudence sur les scénarios de la poule 6 (Assassinat, Brouillard de Guerre).
La troisième composante de votre réflexion sera la table de jeu. Est-elle chargée, ouverte ? Est-ce de la forêt ou des bâtiments ? Y a-t-il des positions que vous ou votre adversaire pouvez défendre ? Serez-vous contraint de vous battre en terrain ouvert ? Y a-t-il du couvert contre le tir ?
Une fois ces informations en main, vous pouvez les combiner pour aboutir à un plan de jeu. Vous jouez contre une horde sur un scénario qui ne demande pas de défendre un objectif ? Trouvez vous une position confortable sur le champ de bataille, un goulet où vous pourrez empêcher l’ennemi de se servir de son nombre pour vous écraser. Vous êtes l’armée la plus rapide sur Tenez vos Positions ou Diviser et Conquérir ? Plein gaz vers le centre et priez pour tenir le choc quand votre adversaire vous rattrapera. Vous avez la meilleure pression de tir sur À la mort ? Installez vous tranquillement au fond de la carte et attendez que votre adversaire arrive jusqu’à vous, si il l’ose…
Comme je disais, il est délicat de fournir une liste de choses à faire pour se déployer à la perfection, tant cela dépend de facteurs variés. Ces derniers paragraphes énoncent beaucoup d’idées simples pour aider à se représenter les choses, mais les exemples que je cite sont lacunaires et oublient une flopée de paramètres. Chaque partie sera différente.
Note d'Amàndil
Outre ces points qui sont effectivement très important pour préparer au mieux le déploiement en amont, votre réflexion doit également se prolonger pendant celui-ci : qu’est-ce que votre adversaire essaye de faire ? Et comment réagir au mieux à ce qu’il fait ?
Là, c’est votre faculté d’adaptation qui doit faire la différence. Votre adversaire a déployé des cavaliers à moins de 6 » de la ligne centrale sur un scénario de déploiement à 24 » : devez-vous changer votre beau plan tout propre sur le papier et disposer une troupe d’Infanterie en face pour essayer de les bloquer dès le tour 1 ? S’agit-il d’un piège de votre adversaire pour que vous divisiez vos forces ? Est-ce pertinent sur le scénario ? Autre situation, il a positionné des arbalétriers dans un couloir : devez-vous vous déployer en face et vous préparer à foncer, avec des Marches, pour les atteindre rapidement ? Ou au contraire, est-il préférable de les laisser moisir dans leur couloir et de se déployer ailleurs ? En bref, dans beaucoup de cas, un bon déploiement se fait aussi au regard de celui de l’adversaire.
Évidemment, cela requiert de l’expérience, mais aussi une certaine vista et surtout, une grande capacité d’adaptation, notamment dans les scénarios où les deux armées commencent assez proches l’une de l’autre.
Lorsque vous en jouez un, prenez systématiquement quelques secondes à la fin du déploiement pour prendre un peu de recul : par rapport au match-up et au scénario, vos chances sont-elles améliorées ou réduites après le déploiement ? Pourquoi ?
Dans cette partie de Capture et Contrôle (un scénario idéal pour s’entraîner au déploiement), mon adversaire, au nord, jouait une troupe avec de majorité de CC4 (Minas Tirith) et une autre avec une majorité de CC3 (Cavaliers du Rohan). Il a d’abord déployé ses cavaliers très proche de la ligne centrale, ce que je n’avais pas du tout anticipé avant la partie !
Mais je me suis adapté et j’ai donc disposé mes CC5 (Elfes) en face de sa troupe du Gondor, et mes propres troupes du Gondor en face de sa troupe du Rohan : ainsi, j’avais l’avantage partout.
N’hésitez pas à (re)découvrir ce rapport de tournoi qui a été particulièrement intéressant du point de vue du déploiement, pour les parties 1, 2 et 4 ici.
La section qui suit va traiter de conseils généraux pour aborder le déploiement proprement dit : une fois que vous avez une idée de comment vous comptez jouer, comment retranscrire ça dans la pratique ? Quelles erreurs ne pas commettre ? Dans quel ordre installer ses troupes ?
Ces conseils sont globalement valables sur toutes les parties mais je me concentre ici plus spécifiquement sur les scénarios à déploiement traditionnels, excluant donc les scénarios à Maëlstrom (Contrôle du Champ de Bataille, Relique des Âges Passés et Tenez vos Positions) et Reconnaissance, que nous verrons plus tard.
Les 14 autres scénarios vous demanderont de poser votre armée dans une zone définie, en alternant généralement avec votre adversaire : il pose une troupe, vous en posez une, il en pose une, et ainsi de suite. Mais au fait, par quelle troupe commencer ?
Si vous avez des héros seuls dans leurs troupes, ou avec très peu de soldats, c’est une bonne idée de les poser d’abord. En effet, vous ne sortez pratiquement rien de votre armée et laissez donc votre adversaire abattre ses cartes avant vous : si vous voyez où il se met, vous pouvez comprendre ce qu’il veut faire et donc le contrer. Dans cette même logique, mieux vaut garder ses gros héros, monstres et magiciens (exemple facile : les Ombres Ailées), pour la fin du déploiement. Ainsi, vous pourrez les positionner là où ils seront les plus utiles, tout en faisant planer leur menace tout au long de la mise en place de la partie. Là aussi, tant que votre adversaire ne les voit pas, il ne sait pas ce que vous comptez faire avec et doit donc prendre en compte plusieurs possibilités.
C’est valable aussi pour vos unités mobiles, dont le placement devra être plus soigné que celui du fantassin de base. Les cavaliers sont fréquemment vus sur les flancs pour menacer de contourner ou bien rangés derrière votre phalange pour s’éviter de prendre une flèche perdue. Les volants, à l’inverse, se voient plus souvent vers le centre de votre formation : ainsi, ils peuvent tirer parti de leur mobilité pour partir dans tous les sens sans que votre adversaire sache où vous comptez aller.
Bien entendu, le placement de vos héros va demander une attention toute particulière. Il y a deux choses que vous devez considérer : votre héros risque-t-il de se faire tuer, et a-t-il besoin de sortir du rang ?
Si votre héros est sous la menace directe d’un assassin volant (Gûlavhar par exemple), placez des figurines autour pour que le monstre ennemi n’ait pas la place de se poser. Si vous ne le faites pas, vous avez de fortes chances de vous faire sanctionner aux premiers mouvements.
Votre héros a-t-il besoin de sortir du rang, pour charger ou déclarer une Marche ? Si c’est le cas, placez le derrière les lignes et laissez-lui un couloir de sortie, de sorte à ce qu’il puisse avancer sans pour autant pouvoir être gêné par les soldats ennemis. Croyez-en mon expérience, se mettre directement en première ligne c’est un coup à finir sous les sabots d’un Theodred en charge…
Attention ! Le couloir peut sembler une bonne idée mais dans certains cas, il est un danger mortel pour votre héros. Avec un peu de magie en face, une Contrainte malheureuse est vite arrivée et votre héros sortirait alors par son couloir pour être cueilli par un Monstre ennemi à la frontière de vos lignes, sans possibilité de se défendre. C’est donc une technique utile mais à utiliser intelligemment sous peine de perdre des héros à cause de ça.
Évidemment, il faut prendre en compte les effets de bulle de vos héros (bannières, bonus à la capacité de combat ou pour blesser…) pour en tirer le meilleur sur les scénarios où vous pouvez jouer groupé. Cela dit, ne vous faites pas avoir : certains scénarios vous demanderont de séparer vos forces pour défendre plusieurs endroits (Domination par exemple). À ce moment, tant pis pour vos effets de bulle, ils sont moins importants qu’une victoire.
Pensez également à mettre un petit héros à 6 pouces de vos grosses pièces pour pouvoir déclarer l’Elan Héroïque avec le petit héros (cf Tactica Puissance). On préfère toujours sacrifier la Puissance d’un Guritz plutôt que celle d’un Roi-Sorcier, qui en aura besoin pour Frapper ou assurer des sorts…
C’est une fois encore à double tranchant pour les volants : dans les situations où vous voudrez les envoyer au loin, qu’ils soient contraints par un Elan Héroïque va beaucoup vous gêner. Soyez sûr de ce que vous voulez faire avec votre bestiole avant de vous placer !
Enfin, dernier commentaire : dans la majorité des scénarios, les troupes doivent se déployer à 6 pouces de leur capitaine. Rappelez-vous que ce n’est pas le cas pour tous : Attaque de Campement ainsi que Diviser et Conquérir ne répondent pas à ces restrictions.
J’estime que pour un sujet aussi complexe que celui du déploiement, des exemples concrets vaudront davantage que toutes mes élucubrations. J’ai donc étudié des déploiements de joueurs plus expérimentés que moi en situation réelle (notamment en épiant l’entraînement WTC des équipes de France et deux Ligues Vassal), afin de disséquer un peu les décisions qu’ils avaient prises et comment ils avaient choisi d’aborder les parties. Merci à ceux qui ont participé ! Le but n’est évidemment pas de porter un jugement en cas d’erreur de leur part, mais plutôt d’en profiter pour comprendre ce qui aurait mieux fonctionné.
Note d'Amàndil
Cette technique consistant à « mettre une troupe adverse dans le vent » dépend bien sûr des autres facteurs déjà évoqués (notamment le scénario), mais c’est un outil d’une puissance redoutable : en terme de probabilités, si toute votre armée se bat contre la moitié de l’armée adversaire, vos chances de victoire s’améliorent grandement dans l’immense majorité des cas.
Etude de cas n°1 : L’ordre des troupes - Capture et Contrôle : Barbecue vs Daïkyu
Mon premier exemple nous est fourni par deux grands noms de la scène compétitive française. D’un côté, Barbecue joue un Mordor traditionnel (100% pur jus meta française), mené par l’Immortel avec Reine Araignée, un tambour et quelques petits magiciens. Sa liste est plutôt mobile, avec beaucoup de héros utilitaires (Kardûsh, Guritz et Muzgur) et un gros combo Nazgûl + Reine des Araignées pour réaliser un assassinat. En face, Daïkyu représente la next gen et aligne la Légion Légendaire des Tréfonds de Dol Guldur, plus rare sur les tables mais qu’il joue assidûment. C’est une armée composée d’orques de Gundabad et de chasseurs orques (notez que les chasseurs avec arc sont représentés par des Uruk à arbalètes sur la photo) qui s’articule plutôt autour de la grosse menace que représente Azog monté (qui bénéficie avec les règles de la Légion de la Résistance à la Magie et du Combat Héroïque gratuit). Sur Capture et Contrôle, les deux armées commencent à 24 pouces l’une de l’autre. Si l’une essayait de se mettre plus en retrait, elle garantirait instantanément un grand contrôle de la carte à son adversaire, ce qui rendrait la partie très difficile à gagner.
Barbecue remporte le jet de déploiement et pose en premier son Muzgur, qui est seul dans sa troupe. Daïkyu riposte en posant Thrain le brisé, également seul. L’un comme l’autre veulent forcer leur adversaire à dévoiler ses mouvements en posant le minimum de figurines sur la table avant d’en voir davantage.
Barbecue pose ensuite l’Immortel, son général, au milieu de la table. Protégé derrière deux lignes d’infanterie et étant plutôt safe de nature, le Nazgûl est placé de la sorte pour pouvoir pressuriser Azog peu importe où celui-ci sera déployé. S’il avait été sur un flanc, Daïkyu pouvait mettre Azog sur le flanc opposé et se libérer de la plus grosse menace magique de la liste Mordor.
En réaction, Daïkyu place son Gardien des Donjons au centre, pour faire face à la phalange posée par Barbecue. Celui-ci enchaîne avec Kardûsh sur le flanc à sa gauche, et une fois encore Daïkyu joue en réaction en posant son capitaine chasseur en face. Le capitaine chasseur étant monté, il se place le plus loin possible de ses troupes pour ne pas être chargeable dès le premier tour, mais peut tout de même venir impacter le combat selon ses propres termes avec ses dix pouces de mouvement. Barbecue installe alors son Guritz à droite et Daïkyu n’a plus d’autre choix que de poser Azog sur ce même flanc. Après avoir vu où les trois magiciens de Barbecue étaient positionnés, il a pu choisir la zone du champ de bataille où sa pièce maîtresse serait la moins exposée à eux. Contrairement à l’Immortel de Barbecue, Azog dispose d’un large couloir de charge pour pouvoir aller au combat : il ne craint pas grand-chose de l’armée du Mordor, là où le Nazgûl nommé d’en face a plutôt envie de rester à couvert.
Enfin, Barbecue termine par le déploiement de sa Reine des Araignées avec la nuée de chauve-souris qui l’accompagne. Bien qu’elle soit quasiment seule dans sa troupe, il l’a gardée pour la fin car il s’agit de son meilleur atout offensif : il n’a aucun autre héros combattant. Ici, il a choisi de la placer au milieu : avec sa mobilité, elle peut choisir de partir à droite ou à gauche en renfort. A posteriori, Barbecue se dit qu’elle aurait été plus efficace directement placée sur un flanc, dans une optique plus offensive.
Notez enfin que comme Barbecue a 5 troupes à déployer et son adversaire 4, même en ayant remporté le jet de déploiement, il peut permettre à sa Reine des Araignées de sortir après toute l’armée adverse.
J’estime que ce déploiement illustre plutôt bien le choix de l’ordre des héros à poser, ainsi que l’utilité d’avoir beaucoup de troupes dont certaines vides. Les listes composées de la sorte ont souvent un avantage tactique au déploiement. Notez également le placement en retrait des cavaliers et tireurs, qui seront notamment chargés d’aller cliquer l’objectif du fond de table de chaque joueur durant le début de la partie.
Note d'Amàndil
Etude de cas n°2 : Refuser l’affrontement - Domination Manadar vs Kermarek
Ici, on est sur une partie de Ligue Vassal VI entre Kermarek (demi-trolls) et Manadar (Khazad-Dûm). Le scénario, Domination, implique de se déployer plutôt au corps-à-corps direct, ce qui plaît beaucoup aux robustes demi-trolls.
Kermarek remporte le jet de déploiement et place sa troupe pleine de demi-trolls en plein centre de la carte, affirmant ainsi son envie de casser des bouches (quand je vous disais que le déploiement donne les intentions de l’adversaire). Manadar place donc la troupe de son Roi nain tout à droite, puisque la première ligne de Kermarek est installée ailleurs. Là aussi, le message est clair : Manadar compte jouer là où son adversaire n’est pas. En effet, les demi-trolls aiment se mettre en bulle autour de Suladan et exploser tout ce qui passe à leur portée, mais s’étaler c’est moins leur truc car le sous-nombre se fait alors bien plus sentir. Kermarek complète son bloc d’armée en mettant les haradrims en soutien, avec Suladan.
Manadar achève son déploiement avec une troupe à gauche puis l’arc de cercle au centre. Kermarek place ensuite un Roi Mahud et un chef Mahud, seuls dans leurs troupes. En l’état actuel des choses, Manadar veut forcer les demi-trolls à avancer au centre pour les encercler, tandis qu’il pousse sur les côtés pour partir à la conquête des objectifs, un plan de jeu qui se lit très facilement en regardant son positionnement.
Ce que Kermarek aurait pu faire pour compliquer la vie de Manadar, c’est poser d’abord ses héros sans soldats (il en a deux, un Roi et un chef Mahud). Cela aurait forcé Manadar à poser deux troupes entières avant que Kermarek ne positionne ses demi-trolls, ce qui lui permettait donc de cibler le bloc de nains le plus juteux. Ainsi, Manadar aurait eu plus de mal à éviter le combat.
Note d'Amàndil
Déploiement en Maëlstrom et Reconnaissance
J’ai choisi de regrouper ces quatre scénarios ensemble car ils ont pour point commun que vos troupes « entrent » sur la table, à la différence des autres déploiements où elles apparaissent comme par magie dans les zones dédiées. De plus, il vous faudra lancer un dé pour déterminer comment vos troupes entrent.
Attention ! Les troupes entrent pendant une phase de mouvement. Cela implique beaucoup de choses : des archers ayant bougé de plus de la moitié de leur mouvement ne pourront pas tirer, les magiciens peuvent utiliser leurs pouvoirs magiques en entrant, et vos troupes entrent toutes les unes après les autres (donc le joueur qui gagne le jet de déploiement doit faire entrer toute son armée et son adversaire pourra s’adapter ensuite).
Notez aussi qu’en aucun cas vos troupes qui entrent ne sont obligées de rester à 6 pouces de leur capitaine. Cela permet à la cavalerie de prendre une longueur d’avance sur les autres, par exemple.
Reconnaissance
Sur Reconnaissance, ce n’est pas bien compliqué : sur 1-3 au dé, votre troupe ne rentre pas (elle bénéficiera d’un bonus pour tenter d’entrer le tour suivant). Sur 4-6, elle rentre par votre bord de table (qui sera donc le même pour toutes vos troupes, et opposé à celui de votre adversaire). Votre objectif est de traverser la table : si vous disposez de plusieurs éléments mobiles (cavalerie, volants, troupes avec tambour + marche…), séparez-les au maximum en en mettant un par côté de la table. Cela forcera votre adversaire à séparer ses ressources pour gérer le danger qu’ils représentent. A l’inverse, assurez à vos tireurs de bonnes lignes de vue : ils peuvent être utiles pour arrêter les figurines adverses isolées qui voudraient traverser.
Maëlstrom : conseils généraux
Les scénarios de Maëlstrom sont généralement redoutés par les joueurs compétitifs, car ils sont très imprévisibles : le côté d’entrée de vos troupes est déterminé entièrement aux dés !
Sur un résultat de 1, la troupe n’entre pas. Sur un 2, elle est placée par l’adversaire sur un bord Nord ou Sud, sur un 3 elle est placée par l’adversaire sur un bord Est ou Ouest. Sur 4 et 5, c’est vous qui décidez de votre point d’entrée : respectivement Nord-Sud ou Est-Ouest. Sur 6, vous pouvez choisir n’importe quel point d’entrée. Le jet de dé peut être corrigé à la puissance et c’est généralement le choix fait par les joueurs, car laisser l’adversaire placer une troupe peut la rendre totalement inutile. Pour peu que les jets se passent mal, vous entrez sur la table avec un gros désavantage.
Note d'Amàndil
Certaines armées ont des outils pour amortir l’entrée en Maëlstrom : le bonus d’armée des monts de fer ou des profils comme Lurtz, Madril ou Guritz qui est le meilleur de cette catégorie. Ce petit orque bien pratique, pour la modique somme de 60 points, permet à vos troupes de bénéficier de +1 ou -1 à leurs jets d’entrée si elles le souhaitent, à partir du moment où il est sur la table (autrement ce bonus ne s’applique qu’à sa propre troupe). S’il est dans votre armée, n’hésitez même pas et faites-le sortir le premier lors du Maëlstrom.
Concernant l’ordre des autres troupes, essayez de garder celles qui ont le plus de Puissance pour la fin : elles pourront se regrouper plus facilement avec celles qui ont moins de contrôle sur leur entrée et ainsi les protéger. La remarque est aussi valable par exemple pour Lurtz, qui ne jette pas de dé et entre où il veut. Le garder pour la fin permettra de rattraper une troupe un peu perdue. Car une troupe isolée est une cible facile pour votre adversaire si il rentre après vous et décide de l’exploser !
Si vous faites 2 à votre jet de déploiement, vous pouvez utiliser de la Puissance (ou le bonus de Guritz/des Iron Hills) pour réduire le jet et empêcher la troupe de rentrer. Cela vous permet de la garder en menace pour le tour suivant et d’avoir peut-être un meilleur jet, donc un meilleur placement.
Point très important : si votre adversaire rentre après vous, il peut vous attaquer dans le dos en sortant derrière vos troupes. Pour empêcher cela, disposez des figurines près du bord, de façon à ce qu’il soit impossible de passer un socle entre leurs zones de contrôle. Ce dispositif, sobrement baptisé « dispositif anti sortie dans le cul » par Ar-Mandô, protège vos arrières et gêne les mouvements de votre adversaire. Mise en pratique !
Etude de cas n°3 : Notre blocus est parfaitement légal Contrôle du Champ de Bataille : Shakâ vs Glorfindel
Contrôle du Champ de Bataille
Détaillons le scénario. Vous devez avoir le plus de figurines dans chaque quartier du champ de bataille en évitant le centre, ce qui avantage donc beaucoup les armées nombreuses. Généralement, vous allez chercher à sécuriser deux quarts et à en disputer un à votre adversaire.
C’est un avantage non négligeable de sortir en deuxième. Vous pouvez rentrer directement derrière
votre adversaire s’il ne s’y est pas préparé et qu’il est plus faible
que vous en combat de phalange, ou à l’inverse vous positionner pour barricader vos deux quarts de table de la façon qui vous conviendra le mieux. N’hésitez pas à anéantir rapidement une troupe isolée de votre adversaire si vous en avez l’occasion, en l’écrasant entre deux des vôtres par exemple.
A l’inverse, si vous rentrez en premier, soyez conscient de ce risque et protégez vos arrières. Grouper ses troupes est plus sûr mais vous perdez en menace globale sur la carte !
De façon générale, il est conseillé de cibler les milieux de bords
de table comme points de sortie : de la sorte, vous pourrez facilement
rapatrier une troupe dans un quart ou dans l’autre en fonction des
besoins.
Ce second exemple est une partie amicale qui oppose deux autres très bons joueurs: Shakâ (Gobelinville) et Glorfindel (Légion Légendaire des Assaillants du Gouffre). Contrôle du Champ de Bataille est un scénario excellent pour Gobelinville avec son nombre écrasant de 80 figurines. En face, la Légion est à l’inverse très handicapée : ses engins de siège sont posés sur la table avant le début du déploiement, et donc vulnérables si Gobelinville sort d’abord. C’est ce qui se passera sur cette partie et Shakâ, sorti le premier, prendra possession de tout le bord de la table pour démonter les balistes sans que Glorfindel puisse leur venir en aide… puisque TOUT le bord de table a été obstrué par des gobelins, comme vous pouvez le voir sur l’image.
Glorfindel tente en réaction une approche très innovante qui mérite d’être rapportée ici. Il installe une troupe, celle de son général qui est aussi la plus petite, à cheval sur deux quarts encore vides de gobelins. Tout le reste de son armée va s’entasser sur les bords, au plus près des forces de Gobelinville. Le Roi Gobelin est en effet placé sur le côté et un peu vulnérable. Le plan est le suivant : Glorfindel sait qu’il ne pourra pas gagner. Il agglutine donc toutes ses forces autour de ses deux bombes et se fait sauter tour 1 en entrant sur la table. À la suite de l’explosion, il sera réduit à 25% de ses forces et la partie s’arrêtera. Dans le pire des cas, Shakâ aura deux quarts de table et Glorfindel sera démoralisé, tout en ayant également deux quarts : 6-4, défaite mineure seulement. Mais avec le Roi Gobelin à portée, Glorfindel aura sans doute le 6-5 (blessure du général de Shakâ)… et sur un coup de bol où le Roi Gobelin meurt, l’égalité 6-6 !
Le gros gobelin survivra à cet attentat contre sa personne et la partie finira donc en un temps record, non sans nous avoir beaucoup fait rire.
Note d'Amàndil
Etude de cas n°4 : Aborder un Maëlstrom - Tenez Vos Positions : Coco painting stuff vs Barbecue
Ici, le scénario demande de rusher le centre. A ce titre, le placement de vos troupes avec Marche (et/ou tambour) sera primordial : ce sont elles qui peuvent entraîner votre armée vers le milieu au plus vite. Dans beaucoup de cas, celui qui arrive le premier au centre a les meilleures chances de le tenir contre les assauts de son opposant. Faites donc aussi attention au chemin que vous allez suivre : éviter de sortir trop sur la diagonale, privilégiez les itinéraires directs, sans trop de terrain difficile ou d’obstacles, afin de progresser plus vite.
Rien ne vous oblige à disputer la course à la loyale. Il est tout à fait possible de sortir à côté de votre adversaire pour l’attaquer avec une partie de votre armée et le ralentir, pendant que le reste de vos forces converge vers le centre de la carte.
Nous retrouvons, sur une table qui commence à être familière, Barbecue et Coco painting stuff. Barbecue est toujours avec son armée du Mordor présentée plus haut, et il affronte cette fois Coco, autre joueur émérite des tournois internationaux. Coco aligne une soupe du Bien (eh oui ! Du Bien dans un de mes articles !) avec Khazad-Dum, Gwaïhir, Arnor et de la Forêt Noire avec Legolas.
Barbecue remporte le jet de déploiement, ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose, et sort en premier sa carte maîtresse pour le Maëlstrom : Guritz, que nous avons déjà évoqué plus haut. Il fait 2, paye un point de Puissance et utilise son bonus pour sortir à Sud (à droite sur la photo). Les autres troupes suivront son exemple et il groupera tout à ce point de sortie : en effet, il y a une grande étendue dégagée avec le moins de distance à parcourir et le moins d’obstacles vers l’objectif central. Grande absente du premier tour, la Reine des Araignées fera 1 à son jet : Barbecue ne le modifiera pas et la laissera en réserve.
C’est ensuite au tour de Coco. Celui-ci est en difficulté sur ce style de scénario : sa phalange fonctionne bien mieux en bloc et il n’a qu’une seule troupe avec Marche. De plus, contrairement à son adversaire, il n’a pas d’autre moyen que sa Puissance de contrôler les jets de dés d’arrivée : tout peut donc mal tourner. Il commence par sortir Gwaïhir à l’Est, en position offensive : il a prévu d’engager au plus vite le combat. Arrive le facteur imprévu du Maëlstrom : la troupe du Roi Nain de Khazad-Dûm fera 1 pour rentrer. Même en payant 2P (ce qui revient à sacrifier sa seule marche), impossible de rentrer en choisissant son point d’entrée. La première ligne de l’armée du Bien ainsi que sa seule Marche Héroïque doit donc rester en réserve, ce qui est de très mauvais augure. Coco s’adapte : il positionne sa troupe Arnor au Nord, à l’opposée des forces du Mordor, et ses Elfes à l’Est, du côté de Gwaïhir.
La photo est prise pendant le second tour de jeu : Coco a commencé à avancer ses forces et a sorti les nains à l’Ouest (bas de l’image). Barbecue, qui est en train de jouer son tour, fait progresser rapidement ses forces à droite. Il sortira finalement la Reine des Araignées côté Sud, mais la jettera sans tarder sur la troupe naine pour la ralentir.
Avec sa liste plus forte sur ce scénario et l’entrée tumultueuse de Coco, Barbecue semble plutôt bien parti pour l’emporter.
Note d'Amàndil
Il est intéressant de noter que pour le déploiement, jouer des listes avec des troupes dépendantes les unes des autres (comme Coco ici, mais c’est un cas qui arrive fréquemment avec les alliances, où on va chercher le premier rang de la phalange dans une faction, et le second rang dans une autre) est un énorme désavantage : en effet, non seulement placer l’une de vos troupes indique directement à l’adversaire ou l’autre va sortir ensuite, ce qui vous rend extrèmement prévisible, mais en plus, vous vous exposez grandement aux mauvaises sorties sur les scénarios de maëlstrom.
Ce genre de liste est donc à double tranchant, car on perd en imprévisibilité ce qu’on gagne en force brute. Or, l’imprévisibilité est un atout majeur dans le jeu et l’une des clefs d’un déploiement réussi.
Etude de cas bonus n°5 : Le millefeuille d’un Maëlstrom alterné - Relique des Âges Passés : Asdru vs Romain
Ce scénario est un peu particulier car il peut très vite basculer sur un bon jet de dé adverse, plus encore que les autres Maëlstrom. En effet, votre objectif sera de révéler diverses reliques sur la table : sur un 6, vous détenez la vraie et marquez des points de victoire tant qu’elle est en votre position. Il est donc difficile de déterminer un mode de déploiement qui fonctionnerait dans tous les cas : soyez prêt à intervenir n’importe où sur la carte, car si votre adversaire déterre la relique, il faudra aller la lui reprendre…
Comme sur Contrôle du Champ de Bataille, il est aussi très envisageable de jouer l’offensive en sortant à côté de son adversaire immédiatement.
En petit bonus de cet article, je vous propose un déploiement en Maëlstrom alterné ! Cette modification de scénario se trouve dans la “meta Eremanth”, c’est à dire par exemple le tournoi de Goven et tous ceux qui se tiennent sur Vassal (ceux qui sont organisés par Amàndil, donc, mais aussi le tournoi de Romain à Rouen). Ce n’est donc pas la version officielle du scenario mais une variante assez fréquemment jouée pour que j’estime pertinent d’en parler.
Le Maëlstrom alterné, comme son nom l’indique, ne fait plus sortir l’intégralité de l’armée d’un joueur à la suite. Au lieu de ça, à la première initiative, chaque joueur lance alternativement le dé pour faire entrer une troupe de son armée jusqu’à ce que tout ait été déployé (sauf, toujours, pour les troupes qui font 1).
Cette étude de cas oppose deux joueurs confirmés de Vassal sur le quart de finale de la Ligue Vassal d’hiver 2022. D’un côté Romain aux commandes d’une alliance Minas Tirith (deux Rois des Hommes représentés par Hurin et Faramir), Lothlorien (Galadriel, piquiers Galhadrim) et Monts Brumeux (Gwaïhir). De l’autre Asdru, avec une alliance Umbar (Dalamyr comme général, Bosco corsaire, Chevalier d’Umbar) Horde-Serpent (Suladan et deux cavaliers).
Le scénario est Relique des Âges Passés et l’entrée en Maëlstrom est plutôt à l’avantage de Romain qui a 10 points de Puissance, là où Asdru n’en a que 8. Ils ont tous les deux une unité volante mais Romain a deux héros montés à cheval là où Asdru n’a que Suladan, qui est groupé avec sa cavalerie. C’est plus ennuyeux sur ce scénario où l’on a tendance à s’éparpiller. Umbar a toutefois à son avantage le nombre (46 contre 36) et sa puissance de tir avec les arbalétriers.
Romain se déploie le premier : il fait 6 avec un de ses Rois des Hommes et se place au Nord, près d’une relique sur laquelle il envoie son cavalier qui démonte pour tenter de déterrer. Et là, il refait 6 et a donc la relique dans les pattes au tout début de la partie. Pris au dépourvu, il rapproche le reste de sa troupe du porteur de relique et se prépare à encaisser l’orage. En effet, les armées des deux joueurs vont maintenant converger vers ce coin Nord-Ouest où la relique a été découverte, car celui qui la détient remporte la partie.
Asdru joue juste après : son Dalamyr fait 3 et paye un point de Puissance pour sortir au Nord, juste derrière la troupe fraîchement déployée de Romain. Il prend soin de laisser ses arbalétriers étalés en cordon de sécurité près du bord de la table : ils sont là pour bloquer le passage des troupes ennemies, qui ne peuvent plus rentrer dans son dos comme lui vient de faire.
Romain enchaîne avec son second Roi des Hommes et n’obtient qu’un 2. Il doit payer toute sa Puissance (2) pour monter à 4 et rentrer au Nord : si il laisse Asdru le placer avec 2 ou 3 comme score, son adversaire l’enverra aux antipodes de l’action et cette troupe sera inutile toute la partie.
Idéalement, Romain aurait voulu rentrer à l’Est pour soutenir ses troupes et empêcher qu’elles soient prises en sandwich. Il ne peut donc que se placer à proximité de Dalamyr pour menacer son flanc.
C’est de nouveau au tour d’Asdru, qui choisit d’envoyer le chevalier d’Umbar : c’est son héros avec le plus de Puissance pour corriger le jet. Lui fait 4 et se cale à l’Ouest(le si convoité bord Ouest !) en payant un point de Puissance : la troupe du porteur de relique est désormais coincée entre deux fronts de corsaires, et les renforts n’arriveront pas de sitôt…
Galadriel fait 4 et paye à son tour un point de Puissance pour rentrer à l’Ouest. Elle s’installe sous la troupe du chevalier d’Umbar, en usant d’une injonction pour écarter un arbalétrier du chemin et faciliter l’entrée des guerriers elfes. Suladan arrive juste après avec un 2, et choisit de sacrifier 2 points de Puissance pour se faufiler dans le bloc de Dalamyr. Là aussi, c’était ça ou le voir envoyé à l’autre bout de la carte par Romain.
Gwaïhir complète l’entrée des forces du Bien (3 au jet, un point de Puissance pour entrer au Nord) en venant se poser un peu au milieu du chaos.
Le Bosco d’Asdru, avec ses derniers soldats, fait 3 et sacrifiera aussi son point de Puissance pour arriver au Nord, complétant ainsi une sorte d’infernal millefeuille dont l’épicentre n’est autre que la relique.
Le camp du Bien a payé un total de quatre points de Puissance et celui du Mal cinq. C’est une somme non négligeable, surtout pour Umbar qui se retrouve à jouer avec 3 points de Puissance restants : un sur Suladan, un sur Dalamyr et un sur le chevalier d’Umbar. Mais ce sacrifice en vaut la peine car il place Asdru dans une position très avantageuse : il menace d’écraser la troupe du porteur de relique qui ne peut pas vraiment espérer d’aide…
Ceci aurait vraisemblablement pu être moins grave si l’accès Nord avait été refermé derrière la troupe du premier Roi, car Romain n’aurait plus eu à se soucier que d’un flanc à défendre. Il aurait aussi pu sortir Galadriel en deuxième, car elle a le plus de Puissance, donc le plus de contrôle sur son jet d’entrée (à moins d’un 1, elle pouvait se placer à l’Ouest moyennant quelques points).
Note d'Amàndil
Voilà une partie qui illustre parfaitement l’article. Au delà de l’aléatoire du déterrage précoce de la relique et de la sortie en maëlstrom bien pourrie pour les deux joueurs, qui ont largement compensé par de généreuses contributions en Puissance, on voit immédiatement ici que le déploiement initial va diriger absolument toute la partie : une simple troupe positionnée ailleurs offrirait une expérience de jeu, et peut-être un résultat, complètement différents.
Conclusion
Et voilà, un tour d’horizon que j’espère avoir été suffisamment ample, même si encore une fois il est impossible de couvrir toutes les situations. Le format des études de cas me paraissait être une bonne façon de couvrir le sujet, en prenant un exemple concret et les décisions des joueurs. Encore merci à ceux qui ont accepté que je mette le nez dans leur partie, c’est un exercice que j’ai beaucoup apprécié à titre personnel et je suis contente de vous en livrer le résultat. Comme les autres Tacticas, n’hésitez pas à revenir plusieurs fois sur l’article, le but n’est pas de tout assimiler d’un coup mais davantage de fournir une base de réflexion !
Note d'Amàndil
A part pour Reconnaissance et les maëlstroms, et en exceptant un pas si anodin jet pour déterminer qui commence, le déploiement est, comme la composition de la liste, un des rares éléments du jeu ou il n’y a aucune prise de l’aléatoire. Cela signifie donc que vous ne pourrez vous en prendre qu’à vous si vous le loupez : c’est un exercice d’adaptation et de rigueur.
Le déploiement fait donc partie des éléments sur lesquels vous avez une prise bien réelle et qui ont un impact décisif sur le déroulement de la partie, et qu’il faut travailler en priorité pour progresser dans le jeu. N’hésitez pas à simuler, seul ou avec un ami, sur Vassal ou sur une vraie table, des déploiements de vos armées. C’est la pratique qui vous fera progresser dans la composition de vos armées, de vos troupes, le choix de vos héros, celui de l’ordre de leur positionnement sur la table selon les scénarios et le match-up.
Merci et bravo à vous deux pour la rédaction de ce tactica. Il couvre extrêmement bien le sujet !
Très intéressant et qualitatif, comme toujours !
Merci beaucoup pour ces précisions ! 😇
Excellent ! Merci beaucoup pour ce tactica. Le format est très sympa et je pense qu’on ne se rend pas vraiment compte de l’énorme travail qu’il y a derrière !